dimanche, novembre 08, 2009

Contre le déclassement : le "transclassement" ?

J'aime beaucoup Alternatives Economiques : sans être d'accord avec tout ce qui est écrit dans ce mensuel, loin de là, il présente toujours des débats intéressants et des analyses sérieuses sur des thèmes d'intérêts.

C'est le cas du débat sur le déclassement, suscité par le livre d'Eric Maurin sur le sujet. Néanmoins, au-delà du débat technique et de mon admiration pour le travail d'Eric Maurin, un doute m'assaille : est-ce le bon débat ?

En effet, concentrer le débat sur le passage d'une classe à une classe dite "supérieure", c'est poser comme hypothèse implicite que la classe est une norme pertinente et qu'il est possible de les hiérarchiser. C'est supposer a priori qu'une vie réussie consiste à finir dans une "meilleure" catégorie sociale que celle de ses parents. C'est très discutable. Par exemple, certaines études sur le bonheur montrent par exemple qu'un diplômé d'un CAP de boulangerie a plus de chance d'être heureux qu'une diplômé de grande école - le premier étant heureux quand il réussit à passer à son compte (ce qui est un rêve accessible), le second pouvant considérer qu'il a échoué s'il ne finit pas PDG d'une entreprise du CAC40 (ce qui est plus difficile).


D'ailleurs, les conditions économiques rendent cet espoir mathématiquement impossible pour tous (même s'il reste possible pour certains) : lorsque la croissance économique va moins vite que la démographie, en présence de perturbations économiques fortes par rapport à une croissance "linéaire" (progression des pays émergents, coût des matières premières, préoccupations environnemtales...), le modèle de progression sociale qui a prévalu durant les "30 glorieuses" n'est probablement pas pertinent, notamment parce que l'économie des années à venir ne sera probablement pas celle des années 60. La croissance des années 60 était une croissance de développement et de rattrapage. Celle des années à venir serait une croissance d'innovation et d'adaptation à des défis nouveaux. Une économie dont l'agriculture se vidait et dont la classe moyenne était en cours de création pouvait tenir la promesse d'une "évolution de classe". Faire la même promesse en 2009 reviendrait à espérer que tous les française gagnent plus que le revenu moyen...

Les générations actuelles auront plus de dette, a priori moins de croissance (même si rien n'est écrit - elles peuvent lutter contre cette tendance par un sursaut d'innovation), et des défis de gestions des ressources rares que n'avaient pas leurs parents. Face à ces évolutions on peut chercher à restaurer la stabilité des status, ou, sur un mode "à la nordique" qui est aussi celui pour lequel je plaidais avec Jaques Attali, chercher à faciliter le "trans classement". C'est à dire effacer la notion de classe en facilitant le passage d'un rôle à l'autre ; assurer la sécurité de l'essentiel (revenu, existence et intéret du travail, sentiment d'utilité ...) en abandonnant des notions accessoires, telles que la vision de classe type "30 glorieuses"...

Bref à nous focaliser sur le déclassement, nous oublions deux choses. D'abord que le bonheur est lié aux normes de bonheur (comme c'est le cas dans l'exemple du boulanger et du diplômé ci-dessus), et que ces normes sont "autodéfinies" (c'est à dire définies par un groupe pour lui-même) : poser le débat d'un retour possible à des normes non tenables, c'est préparer des désillusions futures. Ensuite, que le vrai débat est ailleurs : c'est celui d'une vie heureuse. Même si ce débat rejoint certains des éléments abordés par la "théorie du déclassement" (formation, revenu, inégalités,...), et que la possibilité à changer d'activité fait partie des degrés de liberté importants à chacun, ce deuxième débat est plus large que le premier. Et il n'exclut pas qu'un fils d'ingénieur puisse être plus heureux que son père en choisissant d'être instituteur. Ou en occupant un emploi en apparence "déclassé", mais qui lui permette de trouver son bonheur en dehors d'un cadre prédéfini, d'écrire, de créer son entreprise ou de se consacrer à une cause humanitaire.

Ce fut le cas d'un modeste employé de l'office des brevets de Berne (malgré un diplôme de l'Ecole Polytechnique de Lausanne) en 1902, nommé Albert Einstein. Il est bien possible que, même s'il n'avait jamais publié ensuite d'article à succès, il aurait été plus heureux comme employé poursuivant ses recherche sur son temps libre, que comme ingénieur mieux payé mais ne disposant pas du temps nécessaire à ce qui le passionnait réellement...

jeudi, octobre 22, 2009

Survivre aux crises

A lire : "Survivre aux crises", le dernier livre de Jacques Attali

Comme toujours, des idées innovantes - il trace dans ce livre une analyse très intéressante et donne un "mode d'emploi" sur la façon de s'organiser pour éviter les crises sociales ou économiques.

mercredi, octobre 21, 2009

La stratégie nationale de recherche et d’innovation 2009

Le ministère de la Recherche vient de publier le rapport "Stratégie nationale de recherche et d'innovation 2009" issu d'un large exercice de prospective.

Il indique trois axes prioritaires :

  1. santé, bien-être, alimentation et biotechnologies
  2. environnement et écotechnologies (yc nucléaire)
  3. technologies de l'information et de la communication ainsi que nanotechnologies

mardi, octobre 06, 2009

Bonheur national brut : l'indicateur facebook

Comme nous l'apprend Slate, Facebook mesure, via le changement de statut de centaine de milliers de ses membres, l'état de bonheur - ou de malheur - de ses utilisateurs. Certes ils ne sont pas forcément représentatifs de la population américaine, mais les résultats sont extrêmement intéressants, puisqu'ils fournissent une statistique quotidienne sur le bonheur américain.

Et qu'y voit-on ?

1- les fêtes qui réunissent familles et amis (thankgiving, Noel,...) arrivent en tête

2- la St Valentin pèse moins du tiers de Thanksgiving - peut-être parce qu'elle ne concerne qu'une partie de la population ?

3- le Superbowl pèse très peu, alors qu'il s'agit de l'un des évènements télévisés les plus populaires aux Etats-Unis.

4 - les fêtes nationales comme le 4 juillet ont un effet, mais bien moindre que celles qui se fêtent en plus petit cercle (Thanksgiving)

Bref si vous voulez faire des heureux, faites une fête, en relativement petit cercle et sans télévision. Rendez-vous le 8 avril 2010 !

jeudi, septembre 17, 2009

Suicides chez France Telecom : est-ce mieux ailleurs ?


(rédaction en cours, version provisoire)

Les suicides chez France Telecom, un signe de la faiblesse des ses salariés selon les termes de Christophe Barbier ?

Je pense sincèrement que le problème est ailleurs, et renvoie à un problème que j'ai déjà eu l'occasion de commenter : la contradiction entre une France qui s'est plongée dans la concurrence (ouverture des marchés au niveau européen et mondial, ouvertures à la concurrence de secteur monopolistiques,...) et son système social, qui est relativement généreux relativement à la moyenne des pays développés, mais dont la générosité est focalisée sur la défense des statuts, plutôt que sur l'accompagner les transitions.

Car notre système social, même s'il est en train d'évoluer, est largement marqué par la compensation du statut passé (allocation en % du dernier salaire, recherche d'emploi plus centrée sur la qualification actuelle que sur celle qu'il serait utile de développer pour l'avenir, absence de système d'orientation digne de ce nom, formation gérée par branche ce qui signifie que les gros secteurs du passé ont l'essentiel des moyens et les secteurs naissants aucun) plutôt que sur la préparation des transitions utiles (bilan de compétence, formation, orientation, création d'entreprise, anticipation des mutations,...). La fonction publique n'est pas en reste, la place des corps marquant un système où le statut s'acquiert pour la vie à 25 ans par des capacités scolaires.

Or la concurrence produit son efficacité précisément en réduisant les rentes, et donc en bousculant les statuts. Elle créera un stress qu'il est nécessaire de reconnaitre et d'accompagner - ce que John Hicks résumait dans la formule "The best of all monopoly profits is a quiet life" (ce qui veut aussi dire que le plus gros inconvénient de la concurrence est une vie stressante). Et ceux qui en souffriront le plus seront ceux qui, partant d'une situation de statut (c'est le cas dans les ex-monopoles) sont confrontés à la nécessité de gérer une transition professionnelle (changer de poste, de métier ou d'entreprise) sans disposer du "capital social" - notamment des amis ou une formation qui permet de "rebondir" - ni être accompagné (pole emploi n'aide pas, ou peu, les personnes ayant un emploi menacé, inutile, ou qui place son titulaire dans une position de stress insupportable). Et cela n'a rien à voir avec une supposée faiblesse de l'agent public : elle concerne certains agents de France Telecom, mais également une ouvrière du textile de 50 ans dans le nord de la France, un viticulteur du beaujolais menacé par la concurrence des vins étrangers ou un jeune étudiant en journalisme confronté aux effets sur l'emploi dans son métier de la vague internet.

Dans ces conditions, on peut imaginer trois "mondes" possibles : un monde de castes, de statuts et de faible performance économique (ce qui se traduit aussi par une moindre qualité du système de santé, un plus grande pauvreté,...) mais également d'injustices "larvées" (impossibilité pour un jeune brillant de faire une carrière s'il n'est pas du bon statut ou du bon "corps", réussite professionnelle plus liée à qui ont connait qu'à ce que l'on sait faire, capitalisme de connivence...).

Un deuxième état du "monde" possible, et c'est la situation actuelle en France, cumule l'ouverture à la concurrence et l'absence de système d'accompagnement suffisamment large (touchant les personnes ayant perdu leur emploi, mais aussi celles qui n'en ont pas encore, les jeunes en formation et ceux qui sont dans un emploi dont ils veulent sortir). Il présente les avantages de la concurrence pour les plus mobiles (personnes éduquées ou de "bonne familles", capables de tirer les bénéfices de la mondialisation en en évitant les risques, ou qui disposent au sein de leur "réseau" des leviers pour anticiper et accompagner leurs transitions professionnelles) et ses inconvénients pour ceux qui le sont moins (personne moins éduquées ou spécialisées dans un métier fortement soumis à la concurrence, et ne disposant pas des réseaux permettant de "rebondir"). Il cumule, pour les plus modestes, les injustices "larvées" d'un monde de statuts avec les violences "dynamiques" d'un monde de concurrence (perte brutale d'emploi sans possibilité de préparer la suite, changements d'emploi non souhaités, non anticipés, déqualification faute de disposer d'une qualification dans les métiers "porteurs" ou de s'y réorienter...). Les mieux placés ont, au contraire, les bénéfices du pouvoir d'achat d'un monde en concurrence, avec la tranquillité d'un monde de caste.

La troisième possibilité est celle d'un monde plus productif et plus "dynamique", accompagné d'un système social qui réduit la violence des changements de statut et de la remise en cause des rentes. C'est celui que décrit brillamment John Sutton.

Ou est la responsabilité ? D'abord, d'avoir organisé l'ouverture à la concurrence (libéralisation des marchés, ouverture des marchés, concurrence intra-européenne) - ce qui était une bonne chose - sans avoir, en même temps développé le système social nécessaire pour accompagner ces évolutions. Des responsables politiques comme Jacques Delors ont plusieurs fois dénoncé les risques induits par cette absence de "pilier social" dans la construction européenne et l'ouverture de ses marchés, mais le phénomène est plus large.

La responsabilité, c'est ensuite d'avoir tardé à réagir à ce manque. A la décharge des pouvoirs qui se sont succédés, l'idée que l'accompagnement "humain" soit un maillon essentiel de notre système social est plutôt récente - elle date de quelques années seulement. Avant celà, les "experts" proposaient à gauche, une évolution du droit social (temps de travail, lutte contre le stress) et, à droite, une libéralisation (ouverture du marché du placement des chômeurs, réduction de la complexité du droit social). Dans une certaine mesure, ces propositions avaient, au moins en partie, une utilité. Mais elle n'ont jamais touché le coeur du problème : mettre les moyens et prendre les décisions qui permettront de mieux orienter, former et accompagner les personnes touchés pour les restructurations sous toutes leurs formes. De ce point de vue, la cause est donc l'insuffisance de réflexion et de "recherche et développement" en idées politiques : élus, administrations, chercheurs et partis en portent la responsabilité... La encore, les responsabilités sont diffuses - on y compte notamment les dirigeants de parti qui ont asséché leurs "intellectuels" à force de les instrumentaliser, de ne pas les écouter ou de démotiver ceux qui auraient souhaité consacrer du temps à la "r&d politique".

La cause tient également le niveau de centralisation de notre pays : en effet l'atténuation du stress lié à la concurrence appelle des réponses opérationnelles, proches des gens et de leurs problèmes, là où des experts - économistes ou fonctionnaires - cherchaient des recettes aux seuls problèmes visibles de leur tour d'ivoire statistique (qui ne mesurent pas le mal-être au travail, ni le bonheur d'ailleurs), et des solutions qui puissent s'exprimer par des prescriptions exprimées par eux, et exécutées par des agents de terrains auxquels personne ne demande de réfléchir... D'une certaines façon, de nombreux économistes sont les enfants spirituels des planificateurs, avec l'efficacité que l'on connait.

Pour revenir à l'objet de cet article, il est évidemment faux de dire que l'Etat providence à rendu les gens faibles. C'est au contraire le niveau de pression lié à l'évolution de la concurrence qui induit des pressions parfois intolérables (le lecteur attentif notera la place de pays aussi "tendres" vis-à-vis de leurs salariés que les Etats-Unis). La solution est dans l'accompagnement des transitions, plutôt que dans le "renforcement mental" de personnels jugés trop faibles ! Parler de faiblesse dans ces cas est aussi pertinent que de proposer de la brioche à ceux qui manquent de pain : ca n'aide pas à trouver une solution, en plus d'être insultant - même s'il s'agit probablement d'une maladresse qui aurait pu être évitée en adaptant la force des affirmations à la sensibilité et la complexité de la situation...

mercredi, septembre 16, 2009

Aligner les rémunération des dirigeants sur l'intérêt de long terme ?

(version en cours de rédaction)

Derrière le débat sur le montant des rémunérations des patrons et des traders (que je ne vais pas aborder ici), se cache la question de l'alignement de l'intérêt financier des dirigeants avec l'intérêt de long terme.

Il existe trois grands types d'outils pour celà :

- la valeur de marché de l'entreprise. On peut donc donner des actions ou des dérivés d'actions, c'est à dire lier l'intérêt financier des dirigeants au prix de l'action. L'avantage de ces outils sont leur simplicité (pas de calcul complexe à faire sur ce que le dirigeant a fait gagner : il suffit de lui donner un pourcentage de l'entreprise, ou des options lui donnant droit à une part de l'entreprise). L'inconvénient est que l'intérêt de long terme de l'entreprise n'est reflété que de façon imparfaite dans le prix des actions : ils varient fortement, peuvent être manipulés (une déclaration optimiste du dirigeant la veille de sa levée d'option peut lui faire gagner des millions) et ne réflètent pas uniquement la valeur objective de l'entreprise

- les profits de l'entreprise. On peut alors donner au dirigeant non pas des actions, mais un droit non négociable (c'est à dire qui ne peut pas être revendu) aux dividendes - ce qui conduit à ce que l'intérêt financier du dirigeant ne soit non pas la valeur de l'action anticipée par les marchés (qui est un concept manipulable, volatil et limité par la capacité des marchés à accepter une stratégie), mais le niveau anticipé par le dirigeant des revenus des 15 années à venir (ce qui le poussera vers les projets effectivement rentables, plutot que ceux que le marché, avec ses errements, ses bulles et sa difficulté à comprendre une stratégie complexe, atypique ou audacieuse, peut considérer comme tels à un instant donné).

C'est ainsi que les dirigeants des "partnerships" (tels que Goldman Sachs, ou certains cabinets d'avocats avant son introduction en bourse) ou les actionnaires "familiaux" de sociétés non cotées sont rémunérés. Une variante de ce mode de rémunération consiste à rémunérer l'action d'un dirigeant non pas en bonus encaissable directement, mais en droits à retraite supplémentaires, dont la valeur dépendra de l'état de l'entreprise dans 10 ou 20 ans. L'avantage de cette solution est qu'elle ne recoure pas aux marchés (et permet donc au dirigeant de porter des décisions pertinentes mais difficiles à comprendre par les marchés, et lui évite de succomber aux folies passagères et aux bulles des marchés en visant plutôt les revenus à 10 ou 20 ans), l'inconvénient étant que cet "outil" d'un genre nouveau ne bénéficie pas des exonérations notamment sociales auxquelles les stock options donnent droit.

- un bonus discrétionnaire. En effet, les actionnaires peuvent toujours décider que le revenu des dirigeant sera une formule qu'ils peuvent définir librement. Le bonus peut être annuel (cas des traders ou des vendeurs travaillant à la commission) ou pluriannuel (mais c'est difficile à mettre en œuvre dans les groupes internationaux, car cela suppose de suivre les salariés pour leur verses les bonus liés à leur activité dans leurs postes précédents).L'inconvénient principal de cette formule est d'une part la capacité du dirigeant à manipuler les termes sur lesquels il est jugé (il maitrise en partie le thermomètre sur lequel il sera jugé) et, d'autre part, le fait qu'une formule spécifique, les stock option, dispose d'un avantage fiscalo social tel qu'il est difficile d'examiner d'autres voies.

Le bonus annuel est plus adapté aux salariés dont la contribution est mesurable sur une base annuelle (revenu de trading, objectif de ventes, nombre de pièces réalisées,...), alors que les incitations pluriannuelles conviennent mieux aux personnes dont la contribution est difficile à mesurer par des objectifs précis, ou ceux pour lesquels ont attend justement qu'ils trouvent des voies pour augmenter la valeur de l'entreprise.



Pour des raisons de justice et de cohérence fiscale, il serait difficile de rendre la troisième option (actuellement pénalisée par rapport aux stock options, qui n'acquittent notamment pas de cotisation sociales employeur) plus attractive. En effet, détaxer les bonus conduirait à ce que les entreprises transforment progressivement les salaires fixes en bonus, pour réduire leurs taxes. On pourrait discuter de l'intérêt de taxer les salaires (je pense personnellement que c'est une mauvaise assiette de taxation) - mais à partir du moment où l'on décide de les taxer il nécessaire d'être cohérent et taxer tout le monde de façon équitable.

En revanche, à l'heure où tout le monde dénonce les excès des marchés, on pourrait sérieusement se demander si des outils nettement plus favorable à l'intérêt de long terme de l'entreprise que les stock options ne pourraient pas être étudiés. En particulier, l'idée que les dirigeant soient récompensés pour leur performance par des titres non négociables plutôt que par des stock-option mériterait d'être prise en considération...

vendredi, septembre 11, 2009

Premières conclusions de la Commission "Stiglitz"

La commission "Stiglitz" rendra prochainement son rapport, mais la presse en présente déjà les premiers éléments.

J'attends de lire le rapport, mais les reprises de la presse et les premiers éléments connus m'en font penser du bien. En peu de mots : le bon indicateur de pilotage d'un pays n'est pas le PIB (qui mesure l'intensité de l'activité économique, sans regarder à quoi elle contribue, ni si cette activité rend ceux qui la réalisent plus heureux) mais plutôt un ensemble plus large d'indicateurs qui mesurent les "produits utiles" de cette activité (amélioration de la santé, éducation, cohésion sociale,...) et en déduisent les "nuisances" (pollution, bruit, stress,...). On peut avoir beaucoup d'effets avec peu de moyens, et le contraire peut être également vrai.

En effet, gérer un pays en se focalisant sur le PIB revient à conduire une voiture en ne regardant que le compteur de vitesse, sans regarder le point d'arrivée, les risques d'accident ou la consommation d'essence. La recherche de l'intérêt général demande au contraire de s'intéresser à tout le reste (Kennedy disait "le PIB mesure tout, sauf ce qui est réellement important").

On bute alors sur deux difficultés. La première tient à la complexité du débat démocratique, car il faut alors suivre non pas un seul chiffre (le PIB), mais des dizaines d'indicateurs (santé physique et mentale, insertion, bonheur, sentiment de sécurité,...), et à la facon dont ils évoluent en tout temps et en tout lieu. La deuxième difficulté tient à l'existence, ou non, d'outils de mesure (on mesure facilement l'argent qui circule dans une économie, plus difficilement le bonheur, public ou secret, des citoyens). Or il est plus facile de gérer ce qui se mesure - ce qui conduit souvent les organisations à se focaliser non pas sur ce qui est le plus important, mais sur ce qui se mesure le plus facilement...

Au total, et pour reprendre la métaphore sur la conduite automobile, un chauffard qui ne regarde que la vitesse n'a pas besoin d'une grande expérience, ni de réfléchir à la trajectoire ou au point d'arrivée. La solution n'est pas non plus, à mon sens, de tomber dans l'anarcho-nihilisme.

Ce qu'il faut au pilotage d'un pays, c'est une figure capable de poser des débats, dans leur finesse et leur complexité (tels que celui lancé par la commission Stiglitz), et d'avoir une vision, de l'expérience, de la technique et beaucoup de doigté...

Le mot de la fin appartient à John Kay, dans sa chronique du Financial Times, qui dit "In Peter Weir’s film Dead Poets Society, Robin Williams portrays a charismatic teacher obliged to teach from a text by J. Evans Pritchard. Mr Pritchard explains that “if a poem’s score for perfection is plotted along the horizontal of a graph, and its importance is plotted on the vertical, then calculating the total area of the poem yields the measure of its greatness”. Williams tells his pupils to tear these pages from the book, and goes on to inspire them with a genuine love of literature. We should approach bogus quantification in the same way."

NB : Le rapport est finalement sorti. On peut le télécharger ici.

vendredi, septembre 04, 2009

Sortie en librairie du "Sens des choses"

Le Sens des Choses sort mercredi prochain en librairie. Il est disponible en pré-commande chez les libraires en ligne...

samedi, août 01, 2009

100 milliards

" There are 100.000.000.0000 stars in the galaxy. That used to be a huge number. But it's only a hundred billion. It's less than the national deficit! We used to call them astronomical numbers. Now we should call them economical numbers."
R. Feynman

jeudi, juillet 23, 2009

"Science du bonheur" : une vidéo passionante



Dan Gilbert, chercheur à Harvard, a réalisé un présentation très intéressante sur TED. Il y présente une théorie du "bonheur contraint", ie le fait que la réduction (partielle) de la liberté du consommateur peut augmenter son bien-être. Ces travaux vont à l'opposé d'un principe communément admis en économie, selon lequel le bonheur est une fonction croissante des possibilités de consommation (donc du revenu). Ainsi Dan Gilbert explique-t-il qu'un an après avoir gagné au loto, un gagnant n'est pas sensiblement plus heureux qu'une personne fortement handicapée. Le premier a été fortement heureux au moment de son gain, le second très malheureux. Mais quelques mois plus tard, il n'en resterait, selon Dan Gilbert, pas grand chose en termes de bonheur...

Que peut-on en retenir ? Sans doute que, sans renier l'utilité des outils économiques (il reste utile de mieux connaitre les mécanismes permettant d'augmentation la richesse nationale, et donc les possibilités de consommation), il y a une place pour une "science humaine du bonheur", dont les règles sont fondamentalement différentes de l'économie classique - en effet, les axiomes de base de l'économie ne s'y appliquent pas puisque les individus développent une capacité à "inventer leur bonheur" indépendante de leur situation patrimoniale. Certains pourraient affirmer que, finalement, des cours de philosophie "appliquée" (ie, centrée sur l'enseignement des leviers du bonheur) devraient avoir autant de place à l'école que les cours d'économie...

Les études présentées par Dan Gilbert montrent également que toutes les "richesses" ne se valent pas en termes de bonheur : ainsi, les dépenses permettant de sauver des vies ou de réduire la souffrance valent probablement plus en termes de bonheur que celles qui permettent, par exemple, de passer de son vieux téléphone à un téléphone plus récent...

jeudi, mai 21, 2009

Les "micro délocalisations", ou comment l'introduction de systèmes ouverts sur les téléphones portables va changer le monde

Les opérateurs de téléphonie français distribuent depuis quelques semaines des téléphones fonctionnant sous le système Android.

Celà vous a probablement échappé, et le peu de publicité fait par les opérateurs autour de cette nouveauté n'y est probablement pas étranger. Et pourtant c'est une révolution incroyable qui est en marche, comme le montre un exemple étonnant.

D'abord, quelques mots sur Android. C'est un système d'exploitation, c'est à dire le logiciel qui gère les fonctions essentielles du téléphone (allumer, éteindre, communiquer,...) et permet également à des applications de fonctionner (en leur offrant les fonctions essentielles telles que saisir un texte, ouvrir une fenêtre, accèder au répertoire téléphonique,...). Les systèmes les plus évolués vous permettent d'ajouter vos propres applications, en plus de celles prévues par le constructeur (ce que fait déjà l'IPhone d'Apple) et diffusent un kit de développement (ou SDK) qui permettent à tout personne dotée de suffisamment de connaissances informatique de développer lui-même des applications.

La nouveauté c'est qu'Android est utilisable par tout fabricant. Jusqu'à présent, les fabricants de téléphone avaient le choix entre développer leur propre système (IPhone Os, Blackberry OS,...) ou se contenter de téléphones simples sans véritable systèmes d'exploitation (ce doit être le cas des téléphones Bic "jetables"). Android va donc se développer très fortement, grâce aux fabricants, qui pourront se concentrer sur la partie matérielle du téléphone (design, performances techniques, poids,...) et disposer d'un système d'exploitation performant qui leur offrira dès le premier jour des fonctionnalités performantes, testées et améliorées sur l'ensemble des téléphones qui utilisent le même système, ainsi que des centaines d'applications.

Android apporte donc au téléphone une révolution du type de celle que Microsoft a apporté aux ordinateurs : passer d'ordinateurs disposant chacun de "petits" systèmes d'exploitations. Souvenez vous du T07, de l'Altair, du Commodre 64 ou de l'Amiga, chacun avec son système incompatible dont le développement consommait un part importante du coût de l'ordinateur...

Android a par ailleurs l'avantage d'être un logiciel ouvert, gratuit et améliorable par chacun (même si ce n'est pas à portée de tous, il existe déjà des versions améliorées d'Android).

Désormais, tout ce qui peut s'imaginer en utiliser un clavier, un haut parleur, internet, le GPS, une carte mémoire ou un appareil photo pourra être développé relativement simplement et proposé instantanément à des millions de personnes. Et tous ceux qui avaient un programme (une calculatrice, un logiciel de tenue de comptes,...) vont pouvoir simplement l'adapter pour un téléphone Android.

Ainsi, compare-everywhere vous permet de scanner un code barre et d'obtenir le meilleur prix sur internet pour un produit donné.

Handycalc est une calculatrice pour votre téléphone... qui peut résoudre les systèmes d'équations à plusieurs inconnues, trace les courbes et convertit les devises en obtenant sur internet les cours du jour.

Mais c'est Capture a Card qui me mène au sujet des "micro délocalisations". Programmé par un développeur qui travaille à son compte, ce logiciel vous permet de photographier une carte de visite, qui est ensuite envoyée par internet à un opérateur de saisie dans un pays à bas coût, qui va recopier le contenu de la carte dans votre carnet d'adresses, le tout pour quelques centimes.

Autrement dit, alors que les délocalisations de services étaient jusqu'à présent concentrées sur les projet d'une certaine taille, un individu à son compte peut en réaliser une qui vous apporte un véritable service (qui n'a pas une vingtaine de cartes qui trainent faute du temps pour les saisir ?) sur une tâche aussi infime que la recopie d'une carte de visite. Il n'aura pour çà ni à mettre en place un réseau (internet est là), ni installer des machines spécifiques (c'est votre téléphone mobile), ni un système de paiement (il est fourni pour Google)...

vendredi, mai 01, 2009

Ethique, long terme, responsabilité sociale ou comment être moral dans un monde qui ne l'est pas ?

L'Institut de l'Entreprise a engagé une réflexion sur l'entreprise de 2020. C'est une excellente chose, après la réussite des travaux de France 2025, de voir les entreprises lancer à leur tour une réflection sur leurs thèmes d'avenir.

L'une des questions posées par cette réflexion est la suivante : comment faire en sorte que l'entreprise prenne davantage en compte les préoccupations de long terme. Question passionnante, surtout si on l'élargit ainsi : que faire pour développer l'altruisme, ou la "cohésion sociale" au sein d'un groupe (un état, une entreprise, une équipe,...).

Le premier élément de réponse vient de Fukuyama et tient à la structure du groupe concerné (Cf un ancien billet). Les institutions peuvent créer ou détruire la cohésion sociale (cf cet autre billet). La recherche des bonne institutions paraitra un combat théorique et lointain pour certains. A tort. La société construit ses valeurs à partir des "signaux" qu'elle envoye à ses membres. Pour prendre un exemple, toutes les déclaration sur le l'importance du travail ne valent rien si, comme c'était le cas il y a quelques années (c'est moins vrai maintenant même s'il reste du chemin à parcourir) si notre fiscalité pénalise le retour à l'emploi et notre système d'aide aux chômeurs les dissuade parfois de reprendre un emploi. N'en déplaise à ceux qui font profession d'enchainer les déclarations, les paroles s'envolent mais les institutions et les régles restent...


Le deuxième élément de réponse est plus philosophique : pour être plus altruiste, il faut mieux se "connaitre soi-meme". Ainsi, l'existence de bulles et de récessions est-elle liée à une caractéristique fondamentale de la nature humaine : l'empathie - ie le fait que l'on soit optimiste quand le reste du monde est optimiste, et pessimiste dans le cas inverse. Plus généralement, nous avons tendance à nous conformer au groupe, de façon plus ou moins consciente - comme le montre notamment cet exemple.

L'empathie est une bonne chose pour la cohésion en générale, mais une mauvaise chose dans sa capacité à générer des crises et des dépressions économiques. Un ancien billet rappelle comment les cycles vont et viennent. Il s'agit là d'une littérature économique ancienne.

Une meilleure connaissance de ces phénomènes aiderait à la fois à limiter les excès, mais également à éviter que les crises ne soient traitées avec des remèdes qui empirent le mal. Ainsi, l'analyse de Marx est-elle très intéressante sur certains aspects, mais fausse sur le point le plus souvent repris : la réponse aux conflits de répartition de "fin de cycle" n'est pas une lutte des classe, mais au contraire le développement d'une cohésion qui préparer le cycle d'innovation suivant. La lutte des classe n'a jamais été un moteur d'innovation, au contraire (mais l'ultralibéralisme non plus, du reste).

dimanche, avril 12, 2009

La star academy, institution de l'égalité des chances ?

Les institutions servent à remplir des fonctions essentielles pour la collectivité : la police, la justice ou la santé publiques (prévention, protection contre les épidémies, système de soins...) sont des exemples classiques.

Mais il y en a d'autres. Ainsi devrait-il exister des institutions pour permettre à chacun de trouver la place qui correspond le mieux à la fois à ses capacités, ses envies et aux besoins de la collectivité. Comme je l'avais écrit avec Jacques Attali, c'est précisément autour de cette mission que devrait se recentrer notre système d'aide aux demandeurs d'emploi, élargissant en celà une mission initialement construite par évolutions successives des missions d'aide sociale et de recensement des personnes sans revenu. Il y a encore des efforts considérables à réaliser dans ce domaine, et des défis sans précédents pour le Pole Emploi, tant le changement de métier que suppose cette évolution est grand.

La construction de telles institutions de l'égalité des chances correspond à une demande de plus en plus forte. Les médias, qui ont souvent du talent pour transformer nos rêves collectifs en émissions à succès, ne s'y sont pas trompés comme le prouve l'émergence de nombreuses émissions telles que notamment "Star Academy", "Incroyable Talent" ou "Oui Chef" qui permettent à des personnes de faire reconnaitre un talent "étouffé" par la société. C'est sans doute en partie parce que des millions de personnes ont le sentiment de ne pas pouvoir exprimer toutes leurs capacités, qu'ils plébiscitent ces émissions...

L'un des exemples les plus frappants est celui de Susan, 47 ans, demandeuses d'emploi. A l'inverse, une expérience récente du Washington Post montre qu'un talent exceptionnel exprimé au mauvais endroit ou au mauvais moment passe inaperçu...

dimanche, mars 29, 2009

action, obligations, assurance-vie : que fallait-il acheter pour placer son épargne

Petite mise à jour d'un ancien article comparant, sur 20 ans, le rendement des actions et des obligations.

Sur 20 ans, avant frais de gestion il valait mieux avoir des actions. Si on tient compte des frais, les placements sans risques étaient plus adaptés...

mercredi, mars 25, 2009

Sortie des rapports des groupes de "France 2025"

Le Centre d'Analyse Stratégique vient de publier un travail intéressant, réalisé par 8 groupes de travail durant un an. Ils ont travaillé en toute indépendance pour donner un résultat intéressant, inédit à bien des égards. On peut ne pas être d'accord avec tout - personnellement si je partage beaucoup de leur analyses, j'ai des divergences sur certains point - mais l'exercice mérite largement d'être diffusé et utilisé...

dimanche, mars 15, 2009

Tolérer l'agacement et la désorganisation pour sortir de la crise ?

Deux articles dans The Economist de cette semaine : le premier sur le retour des entrepreneurs, le deuxième sur le chômage. Le journal ne fait aucun lien entre les deux.

Je pense que c'est une erreur. Ceux qui cherchent à créer une activité (entrepreneurs) ont exactement le même rôle que ceux dont la fonction va être de quitter une activité défaillante pour aller vers une activité en développement (chomeur). C'est le concept de "classe créative" développé dans un récent rapport (dans une définition différente de la version proposée par Richard Florida).

Le point de vue consistant à considérer les "chercheurs d'emploi" comme étant au coeur de la classe créative, que j'avais développé avec Jacques Attali ici oblige à changer de point vue. Et, en effet, c'est précisément parce que nous regardons le chômage par le petit bout de la lorgnette ("quand le sage montre la lune, la plupart regardent le doigt" dit le proverbe) que nous avons de grandes difficultés à le résoudre. Un comme si, confrontés à une voiture qui n'avance pas assez vite nous essayions de mettre plus d'essence (ou d'ajouter du kérosène) alors que le problème vient du fait que le chauffeur a des pieds trop larges, et appuie sur la pédale de frein en même temps que sur l'accélérateur : mettre du kérosène pourra accélérer un peu, au prix d'une surchauffe et d'une grande déperdition d'énergie...

La macroéconomie est une science parfois fort utile, notamment lorsqu'elle est employée avec recul et modestie. S'agissant du chômage, il est probable qu'elle ait un effet néfaste. Car que dit la macroéconomie du chômage ? Elle le présente ce phénomène comme la résultante de quelques carburants (exportations, consommation, investissements publics) dans une boite noire (l'économie française) dont elle ne retient des contradictions que le fait qu'elle présente des "rigidités" dont la suppression améliorerait le fonctionnement.

Un peu comme le responsable de la production de chaussures de l'ex bloc de l'Est ne voyait qu'une partie du fonctionnement des usines sous sa responsabilité (le nombre de chaussures produites, les quantités de cuir et éventuellement la paresse ou la médiocrité des ouvriers qui ne font décidément jamais ce que leur demande leur brillante hiérarchie) et négligeait l'essentiel : la cause principale de l'inefficacité d'une économie planifiée est invisible du planificateur centralisé, car c'est le fait qu'elle soit centralisée ! De la même façon, la cause principale du chômage est invisible du macroéconomiste, car c'est probablement le fait que ce phénomène ne soit abordé que d'un point de vue "macro".

Prenons l'exemple de la crise financière. Pour le macroéconomiste, il y a eu trop d'investissement, ce qui appelle à une correction (trop d'investissements hier appelle à une réduction des investissements aujourd'hui). Pour en limiter les conséquences, l'Etat peut investir aujourd'hui à la place du reste de l'économie (il investira un peu moins demain en contrepartie). Avec un peu de chance cet investissement public aura un "effet multiplicateur" (c'est à dire qu'un million d'euros d'investissements publics générera des salaires en France, et induira donc des investissements supplémentaires).

On pourrait voir les choses autrement. La crise financière, c'est avant tout une économie qui "s'est trompé" (ou qui a été trompée), c'est à dire qui a mis ses ressources au mauvais endroit : les meilleurs élèves se sont dirigés vers la finance (et notamment la partie de la finance consistant à complexifier des financement qui n'aurait jamais été accordés s'ils avaient été simples) au lieu d'aller faire de la recherche ou de créer leur entreprise, des montages douteux ont fait apparaitre très rentables des projets ou des prêts qui ne l'étaient pas, des entrepreneurs ont développé le mauvais type de projets (dupés par des financements prenant mal en compte le risque, et des prix déformés par des montages faisant passer le plomb pour l'or,...), des chercheurs d'emploi qui sont allé dans le mauvais sens,...

Dans ce deuxième cas, il faut avant tout faire accepter la réalité telle qu'elle est. Les rendements "normaux" que l'on peut attendre ne sont pas de 15 % mais de 5 ou 6 %. Les secteurs qui apparaissaient "sexy" (tels que celui du crédit facile aux particuliers ou aux entreprises, ou une partie du secteur de la finance) sont en fait "ringards", et les secteurs qui apparaissaient peu rentables alors qu'ils répondent à des besoins forts et durables (services à la personne, infrastuctures...) doivent apparaitre à nouveau attrayants. Et, plus important que tout : il faut favoriser, développer la "classe créative", c'est à dire celle qui sera capable de prendre du recul par rapport aux errements passés pour identifier les secteurs de demain, plutot que les défenseurs du statu quo, bien intentionnés (garantir des emplois, au détriment de la compétitivité de demain ou de la création d'emplois durables) ou moins bien intentionnés (protéger une rente individuelle ou collective). Il faut notamment veiller à ce que les entrepreneurs puissent simplement construire leurs projets (et la complexité, le poids des impots sur les salaires ou les barrières culturelles sont souvent plus fortes que les problèmes de financement), et que les chercheurs d'emploi puissent bénéficier de diagnostics clairs sur leur situation, leur potentiel et les opportunités qu'ils peuvent saisir (on en est très très loin).

Celà n'ira pas de soi : en période de crise, il parait souvent urgent de rassurer et de prendre de "grandes décisions" structurantes. Et comme le disait Peter Drucker, l'entrepreneur "upsets and disorganises"...

samedi, mars 14, 2009

Société de connivence

Je suis toujours intrigué, voir amusé, par la part des articles consacrés aux relations dans les cercles du pouvoir. Qu'il s'agisse de politique ou d'entreprise, combien d'articles ou de livres tournent autour des relations (x connaît y, x fait partie de tel ou tel groupe, réel ou supposé, y s'entend bien avec z mais pas avec x, y et x ont été aperçus ensemble... ), alors que bien peu portent sur les résultats (qu'a fait x dans sa carrière ? quand a-t-il innové ? qu'a-t-il fait de différent de son successeur et de son prédécesseur à son poste ? quel est sa réelle contribution quand on compare les moyens qu'il a mobilisé avec les résultats qu'il a obtenu ?).

Évidemment, savoir "qui connait qui" fait des articles et des livres plus vendeurs et plus faciles à réaliser que d'essayer d'évaluer une contribution personnelle. Il suffit d'une photo volée, d'un organigramme ou d'une liste pour faire un papier. Mais est-il plus important de connaître les "bonnes" personnes, ou de ne pas connaitre les autres, ou bien d'avoir un libre arbitre bien ancré, de l'ouverture d'esprit (généralement liée à la diversité des connaissances) et un attachement aux résultats, quelle que soit la situation et l'environnement ? Voilà des scoops faciles à réaliser !

Or les délits de connaissance ou d'appartenance, de triste mémoire, sont à ranger dans la même catégorie que les délits d'opinion - et les trois sont le ciment du dogmatisme qui voudrait que des personnes différentes ne cotoient que leurs semblables, puisque le simple fait de connaitre une personne suffirait à disqualifier ! J'ai toujours pensé profondément, au contraire, qu'on pouvait travailler avec n'importe qui, dès lors qu'on ne faisait pas n'importe quoi (c'est à dire des choses qui ont du sens, et qui apportent plus à ceux qui vous donnent les moyens d'agir que ce qu'elles ne leur coûtent). Chaque article, chaque livre focalisé de façon excessive sur les relations plutôt que sur le sens et les résultats nous pousse à faire exactement l'inverse...

samedi, mars 07, 2009

Etre au bon endroit au bon moment

Deux références :

1 - Une expérience fascinante du Washington Post : proposer à un violoniste virtuose de jouer dans le métro - c'est un talent extraordinaire, mais au mauvais endroit et au mauvais moment
http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2007/04/04/AR2007040401721.html

2 - Le dernier livre de Malcom Gladwell (Outliers), qui raconte l'histoire inverse : comment le succès nait non du talent, mais surtout de circonstance forfuites ou "héritées"..

mardi, février 10, 2009

L'économie américaine en un graphique



Cliquer sur le schéma pour l'agrandir.
Vu ici.

NB : Ce sont les vrais chiffres, pas des prévisions...

mardi, février 03, 2009

Pour un à deux milliards de plus...

Le rapport Landau, publié il y a quelques années, donnait quelques chiffres dont je ne sais pas s'ils sont confirmés (a priori le rapport est un travail sérieux), mais qui donnent à réfléchir par rapport aux montants des pertes bancaires (2000 milliards) ou des bonus versés aux banquiers (18 milliards en 2008 à Wall Street) :

- avec deux milliards de dollars par an garantis sur dix ans, on assure la scolarisation primaire de tous les enfants d’Afrique subsaharienne

- avec deux milliards de dollars par an, on finance dans des conditions satisfaisantes la recherche médicale sur les grandes pandémies (paludisme, sida) qui affectent les pays en développement

- avec un milliard de dollars par an, on met à la disposition de toute la population mondiale les dix interventions chirurgicales de base nécessaires à la préservation de la vie et de la santé.

Le propre d'une économie qui fonctionne bien est d'allouer les ressources vers les utilisations les plus utiles. Une crise intervient quand il apparait de trop gros écarts entre les promesses d'une économie et ses réalisations. Notre crise est-elle uniquement financière ?

jeudi, janvier 15, 2009

10 défis pour 2025

Les travaux de France 2025 sont achevés. Un premier document vient d'être publié ; il tire de ces travaux "10 défis pour 2025". Le document est disponible ici.